Fondé en 2003 par Patrick Nabal Boucard, le Sant D’A Jakmèl, anciennement connu sous le nom de FOSAJ, s’est rapidement imposé comme un centre culturel emblématique de Jacmel. Il offre un espace unique permettant aux artistes d’exprimer leur créativité, leurs luttes et leurs aspirations. Ce lieu a attiré des visiteurs en quête d’évasion, leur permettant de se déconnecter de la dureté sociale souvent imposée par les politiques locales. Le centre a ainsi joué un rôle crucial dans la préservation et la valorisation de l’identité artistique de la ville, en accueillant des expositions, des performances et des ateliers, tout en restant un phare pour la culture locale.
Depuis 2010, après le séisme du 12 janvier, les efforts pour restaurer ce centre ont été minimes. Les demandes de soutien, soumises à des institutions comme la FOKAL (Fondation Connaissance et Liberté), sont restées sans réponse. Selon Vital Jean Mary Eduard, l’un des responsables du lieu, des appels ont été lancés, des invitations envoyées pour solliciter de l’aide, mais ces démarches ont été ignorées. « On a jeté notre demande à la poubelle », confie M. Vital, déplorant l’indifférence des autorités face à un patrimoine qui s’éteint lentement. Très lentement.
Aujourd’hui, c’est un lieu qui n’a que son ombre. Quelques artistes, malgré tout, continuent de se battre pour garder la flamme allumée. Mais leurs conditions de travail sont précaires, comme des vies suspendues à un fil trop fragile. Ici, la culture picturale, porteuse de mémoire et de sens pour les hommes, semble reléguée au second plan, effacée par des priorités éphémères, comme ce carnaval, dont on nourrit l’opulence des investissements publics, pendant que les lieux de mémoire et de création sombrent dans l’indifférence.
Il nous faut une mobilisation authentique, un véritable engagement et une volonté collective pour sauver le Sant D’A Jakmèl. Sans ces éléments, il pourrait se réduire à un simple écho, un souvenir effacé, une ruine parmi tant d’autres. Le temps presse. Il est crucial d’agir, de résister, avant qu’elle ne devienne une mémoire effacée par l’inertie et la « politique du délabrement ». Ce ne serait pas la première fois que l’on laisserait disparaître une part de notre identité, qu’on effacerait ce qui demeure encore significatif dans ce pays, comme si de rien n’était. Le temps presse.