Le 18 novembre 2025 restera une date gravée dans la mémoire des haïtiens : les Grenadiers ont réalisé l’impensable en se qualifiant pour la deuxième Coupe du monde de leur histoire. Un exploit d’autant plus remarquable dans un contexte socio-politique et sécuritaire extrêmement difficile.
Pour beaucoup, cette qualification est bien plus qu’un triomphe sportif ; c’est un moment de fierté nationale, un signal de résilience face à des années de mépris et d’humiliations. Mais l’euphorie est assombrie par une réalité douloureuse : malgré cette réussite, les supporters haïtiens seront interdits d’entrée sur le sol américain pour la phase de la Coupe du monde organisée aux États-Unis, au Canada et au Mexique.
Une exclusion des fans confirmée
L’administration Trump a réaffirmé qu’elle ne ferait pas de dérogation spéciale pour les supporters haïtiens . Selon le Département d’État américain, l’exception prévue dans le décret concerne uniquement les joueurs, leur famille et le staff ; les spectateurs ne sont pas concernés.
Cette décision fait suite à une proclamation signée par Donald Trump le 4 juin 2025 (Proclamation 10949), entrée en vigueur le 9 juin, qui restreint l’entrée aux États-Unis pour les ressortissants de 12 pays, dont Haïti, évoquant des « menaces à la sécurité nationale » et des taux importants de dépassement de visa.
Le décret prévoit des exemptions pour les athlètes participant à des événements majeurs, tels que la Coupe du monde ou les Jeux Olympiques. Cependant, ces dispositions n’incluent pas les supporters haïtiens .
Une sanction politique qui dépasse le terrain
Ce choix politique a provoqué une vive indignation dans les médias internationaux. Selon L’Équipe, seuls les joueurs haïtiens et leurs proches pourront entrer aux États-Unis dans le cadre de l’exception sportive ; les supporters resteront interdits.
Pour beaucoup, cette exclusion est perçue comme un acte d’injustice : alors que la FIFA, par la voix de son président, Gianni Infantino, a insisté que « tous les fans sont les bienvenus » pour la Coupe du monde, la politique américaine contredit fortement ce message inclusif.
Des organisations comme Human Rights Watch ont alerté sur l’impact de cette mesure, soulignant que si les athlètes sont exemptés, « tous ou presque tous les spectateurs » originaires des pays interdits seraient bloqués.
Quelles stratégies pour la Fédération haïtienne (FHF) ?
Face à cette situation, plusieurs pistes peuvent être envisagées :
1. Dialogue diplomatique et sportif
La Fédération haïtienne de football (FHF) pourrait formaliser des échanges avec la FIFA et la CONCACAF pour plaider la cause des supporters. Il s’agirait de souligner l’importance de la mobilisation des fans comme vecteur d’unité nationale et de pression politique, et d’explorer des solutions concrètes.
2. Modification des lieux de match
Une proposition crédible serait de demander que certains matchs de phase de groupes des Grenadiers soient délocalisés vers des stades au Mexique ou au Canada, où les supporters haïtiens pourraient plus facilement se rendre. Cette option garantira une affluence haïtienne significative dans les tribunes et un soutien populaire visible.
3. Recours diplomatique
Parallèlement au dialogue sportif, la FHF pourrait mobiliser les canaux diplomatiques haïtiens – Ministères des Affaires Étrangères, Ambassade haïtienne à Washington – pour faire pression. Il pourrait être demandé aux autorités américaines d’ajuster la politique de visa ou de créer une exception spécifique pour les supporters dans le cadre de la Coupe du monde.
4. Mobilisation médiatique et internationale
En s’appuyant sur les médias internationaux et les organisations de défense des droits humains, la FHF peut porter cette cause devant l’opinion publique. Une campagne de sensibilisation pourrait mettre en lumière l’écart entre les principes de la FIFA (inclusion, universalité) et la réalité politique imposée par cette restriction.
Pourquoi est-ce essentiel ?
Le football n’est pas qu’un jeu ; pour de nombreux haïtiens , il incarne l’espoir, l’appartenance et la fierté nationale. Priver les supporters de vivre cette Coupe du monde dans les stades revient à restreindre une célébration collective. C’est une question d’identité, pas seulement de sport.
En plus, un mouvement organisé et bien argumenté pourrait faire pression non seulement sur les instances sportives, mais aussi sur les décideurs politiques américains. Il ne s’agit pas simplement d’un caprice : c’est une question de dignité pour des centaines de milliers de fans haïtiens .
La qualification historique des Grenadiers pour la Coupe du monde 2026 est un moment de grâce pour Haïti. Mais si les autorités haïtiennes ne réagissent pas avec détermination, la politique migratoire américaine pourrait transformer ce triomphe en frustration. La Fédération haïtienne a désormais une responsabilité cruciale : défendre le rêve de ses supporters, non seulement sur le terrain, mais aussi sur le plan diplomatique.
Par : Shélo Delpêche




